Atelier 6 — Contrôle et maîtrise des espaces maritimes
Contexte
Malgré l’existence de la Convention de Montego Bay (1982) qui a théoriquement défini les contours du droit territorial des espaces maritimes, le contrôle des routes et des richesses marines et sous-marines constitue toujours un enjeu fondamental pour les pays disposant d’une façade maritime ou ayant de fortes ambitions dans ce domaine. Le fait que certains États n’aient pas ratifié la Convention, comme les États-Unis, complexifie ces enjeux. Espace d’échange et de commerce, source de richesses, la mer est aussi un lieu d’affrontement, de choc entre puissances maritimes.
En Afrique, le défi majeur des États côtiers est le contrôle et la maîtrise des eaux territoriales où la souveraineté s’exerce pleinement, et parfois de la zone économique exclusive où seules les ressources maritimes sont concernées. Le besoin d’affirmation de leur souveraineté et de leur intérêt pour les ressources halieutiques, minérales et énergétiques présentes dans ces espaces constitue le premier point d’intérêt pour les États. Le second est celui de la nécessité de préserver la liberté de circulation en mer et de lutter contre les activités illicites. Ces défis sont d’autant plus importants que, parfois, les espaces maritimes concernés sont plus étendus que la composante terrestre des territoires nationaux. Enfin, il convient d’ajouter la question de la protection des approches maritimes pour prévenir et, le cas échéant, s’opposer à toute action hostile venant de la mer.
L’Union africaine s’est emparée du sujet et cet effort a abouti, en 2016, à la Charte africaine sur la sûreté et la sécurité maritimes et le développement de l’Afrique (dite Charte de Lomé). Elle insiste notamment sur la prévention et la répression de la criminalité transnationale en mer, plus particulièrement le terrorisme, la piraterie, la traite des êtres humains, la pêche illicite et la prévention de la pollution. Outre ce volet sécuritaire, elle a aussi pour objectif le développement d’une économie bleue durable et respectueuse de l’environnement qui constitue, selon la Charte, une « nouvelle frontière de la renaissance de l’Afrique ». Elle invite les États côtiers à mettre en œuvre une stratégie intégrée pour les mers à l’horizon 2050 en vue d’assurer la sécurité et la sûreté des espaces maritimes. Si l’ambition de l’UA et du Togo est à termes de porter cette Charte aux Nations Unies, celle-ci devra au préalable susciter la pleine adhésion de l’ensemble de ses signataires. En effet, à ce jour, force est de constater que seuls deux États (Togo et Bénin) l’ont ratifié sur les 35 signataires initiaux.
Si la surexploitation des ressources halieutiques est observée sur toutes les zones côtières du continent, les activités de piraterie et de terrorisme en mer se sont considérablement accrues au cours des dernières années, faisant des mers du continent les premières zones de piraterie au monde. Ces activités illicites ont lieu essentiellement au large du littoral des pays les plus pauvres et instables, où l’État est faible, voire inexistant, comme dans certaines zones du golfe de Guinée, de la Corne de l’Afrique ou encore du canal du Mozambique. L’action de l’État en mer y est faible, souvent inefficace en raison des difficultés économiques et politiques des pays concernés, qu’aggrave l’insuffisance des moyens et équipements des marines nationales. Enfin, certains accords bilatéraux entre États côtiers et pays développés pratiquant la pêche intensive peuvent avoir des conséquences néfastes en imposant une compétition inégale avec les flottes de pêche traditionnelles, contribuant ainsi à la paupérisation des communautés du littoral.
Répondre à ces défis sécuritaires et économiques pourrait passer par une politique visant à revisiter les mesures nationales et les initiatives régionales comme le Protocole de Yaoundé (juin 2013, impliquant les États de la CEDEAO, de la CEEAC et de la CGG)2. Il conviendrait en effet de redynamiser les cadres nationaux et régionaux pour renforcer le contrôle des espaces maritimes africains, mais aussi de définir une politique d’acquisition de capacités navales (surveillance, contrôle, intervention, etc.) adaptée aux réalités locales.
Objectif
Cet atelier vise à décliner les enjeux et défis actuels et futurs du contrôle des espaces maritimes africains et de proposer des solutions en vue de leur maîtrise durable et leur valorisation par les États concernés.
Enjeux
- Quels sont les enjeux et les défis actuels et futurs du contrôle des espaces maritimes africains ?
- Comment endiguer les lignes de fractures maritimes par une meilleure coordination des architectures régionales ?
- Comment harmoniser les cadres juridiques nationaux, renforcer les capacités des acteurs maritimes et protéger plus efficacement les ressources ?
- Comment soutenir la montée en puissance et la modernisation des moyens des marines nationales africaines ?
2 Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC), Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et Commission du Golfe de Guinée (CGG)
Orateurs
-
Bernard QUINTINSpeaker
Directeur Général adjoint pour l’Afrique (SEAE) / Union Européenne (UE)
-
Jean-Philippe PICQUARTSpeaker
Team leader – GOGIN / Expertise France
-
Oumar WADESpeaker
Chef d’état-major de la Marine sénégalaise (CEMM) (Sénégal) / Marine sénégalaise (Sénégal)
-
Shinji SUZUKISpeaker
Attaché de défense de l’Ambassade du Japon en France / Ministère japonais de la Défense
-
Timothy WALKERModérateur
Directeur programme sécurité maritime (ISS Africa) / Institute for Security Studies (ISS) Africa
-
Tobin (Toby) BRADLEYSpeaker
Deputy Assistant Secretary in the Bureau of International Narcotics and Law Enforcement Affairs (INL) / US Department of State